par Sylvain Bertoldi, conservateur en chef des Archives d'Angers
Vivre à Angers n° 229, octobre 1999
Aujourd'hui décoratives, les fontaines publiques ont longtemps été le seul moyen d'alimenter la ville en eau potable.
De l’eau potable à l’eau festive… L’eau se gagnait autrefois à la force du poignet. Puits et fontaines la fournissaient, mais aussi la Maine. 1856 marque les débuts de la distribution de l’eau de Loire et l’ouverture de bornes-fontaines dans les rues. Peu à peu distribuée dans tous les appartements, l’eau utilitaire de la rue est devenue décorative.
L’eau de la Maine était utilisée pour beaucoup de travaux, mais chaque maison avait heureusement son puits fournissant une eau de bien meilleure qualité. Le puits était souvent mitoyen et partagé en deux par un mur. Les hôtels particuliers possédaient des puits très décoratifs comme celui de Cunault, dans la Cité, en forme de petit temple à l’antique (1591). Le puits de l’hôtel de ville, aujourd’hui dans la cour du cloître de l’hôpital Saint-Jean, possède une belle armature flamboyante en fer forgé.
Complément bien utile, Angers avait aussi quelques fontaines publiques. La fontaine de Pied-Boulet, la plus ancienne conservée, est mentionnée depuis le début du XIIIe siècle. C’est un ancien puits, transformé en fontaine par le duc d’Anjou en 1416. Les travaux de restauration de 1620 et 1630 l’ont laissée telle que nous la voyons aujourd’hui. Non loin de là se trouvait la fontaine très réputée de l’Écorcherie, dite encore de la Godeline, du nom de l’hôtel voisin. Elle servait aux « abattoirs » situés dans cette rue jusqu’en 1847… et a disparu avec le percement de la rue Plantagenêt. Déjà en pleine campagne, sur la route des Ponts-de-Cé, proche d’Épluchard, demeure du roi René, se trouvait la vieille fontaine de Frotte-Pénil.
Trois points d’eau publics alimentaient la Doutre au XVIIIe siècle : Saint-Nicolas (restaurée en 1834), la fontaine des Vignes (protégée par un petit bâtiment en 1825, elle est située sur l’actuelle avenue de l’Hôtel-Dieu) et la belle fontaine (d’où le toponyme de Bellefontaine ) dans l’enclos des Capucins, devenu hôpital au XIXe siècle. Une quatrième fontaine voit le jour dans la Doutre en 1844, place de la Laiterie , car l’eau potable est denrée rare dans ce quartier très densément peuplé. Vers le milieu du XIXe siècle, la place du Ralliement est elle-même dotée d’une fontaine publique, que les travaux d’embellissement de la fin du XIXe siècle supprimeront.
En discussion depuis 1835, le projet de création d’un réseau d’eau de Loire est mis à exécution à partir de 1855. Deux réservoirs sont établis. Sur l’un est installée la belle fontaine jaillissante des fonderies du Val-d’Osne (Haute-Marne), autour de laquelle est créé le jardin du Mail en 1859. Le service des Eaux s’ouvre en 1856. Les premiers abonnés ne sont que 44. C’est pourquoi le conseil municipal avait prévu tout un réseau de bornes-fontaines. Mais, à partir des années vingt, pour inciter au développement des branchements d’eau particuliers, les bornes sont peu à peu supprimées.
L’eau « publique » passe de l’utilitaire au festif. La fontaine du Mail en avait donné le coup d’envoi. Suivent la fontaine Grégoire-Bordillon (1889) ; les petites fontaines du Mail ornées de statues du baron de Chemellier (1892) ; celle de la tour Villebon (1893) ; La Source, place Giffard-Langevin, grâce au legs Giffard (1902)… Puis, petit à petit, la présence de l’eau s’efface dans la ville. Quelques timides essais de bassins à jeux d’eau se font dans les années soixante place André-Leroy. Une fontaine-rose est installée place du Ralliement en 1974. Le renouveau des fontaines s’ouvre avec Jean Monnier : les anciennes sont restaurées, de nouvelles sont inaugurées, place de la Gare, de la République, Romain, Ney… Elles participent au charme de la ville .
- 1 - Pied-Boulet, rue Baudrière
- 2 - Saint-Nicolas, boulevard Clemenceau
- 3 - Vignes, avenue de l’Hôtel-Dieu
- 4 - Garnier, place de la Laiterie (1844)
- 5-7 - Mail, jardin du Mail, 3 fontaines (1855, 1892)
- 8 - Grégoire-Bordillon, place Grégoire-Bordillon (1889)
- 9 - Villebon (tour), rue Baudrière (1893)
- 10 - Pomone, place Monprofit (1909)
- 11 - Roseraie (jardin de la), avenue Maurice-Tardat
- 12 - Rose des sables (de Bernard Perrin et André Hogommat), place du Ralliement (1974), place François-Mitterrand depuis 1994
- 13 - Roseraie, place Jules-Verne (1975)(supprimée au début des années 2000)14 - Pilori (place du) (1979, 1992)
- 15 - Esplanade du Port-Ligny (1981)
- 16 - Wallace, esplanade du Port-Ligny (1981)
- 17 - Centre de Congrès, mur d’eau (1983)
- 18 - Matin des Halles (de Volti), place Mondain-Chanlouineau (1984)
- 19 - Haras (parc du) (1985)
- 20 - Naissance de Vénus (de Jacques Coquillay), place de la Gare (1985)
- 21 - Les Trois Amies (de Jean-Pierre Malaussena), place de la République (1988), déplacée à l'angle de la rue Thiers et du quai Gambetta (2011)
- 22 - Jean-XXIII (place) (1988)
- 23 - Fontaine, place du Pilori (1992)
- 24 - Dialogue (le) (de Gualtiero Busato), place Romain (1993)
- 25 – Ralliement (place du) (1994), nouvelles fontaines (2011)
- 26 - Rencontre (d'Angel-Peres), place Ney (1995)
- 27 – Miroir d’eau et rose des sables, place François-Mitterrand (1996)
- 28 – Le Ciel et la Terre (d'Angel-Peres), place des Justices (2000)
- 29 - Monplaisir, place de l'Europe (2000)
- 30 - Le Messager (de Gualtiero Busato), place La Fayette (2001)
- 31 - Aqua Familia (de Jacques Tempereau), avenue Yolande-d'Aragon (2001)
- 32 - La Terre (globe de marbre), place de la Terre (quartier Mollière, 2002)